Prévention de la Pénibilité au Travail
Le décret 2014-1160 du 9 octobre 2014 dont le dispositif compte pénibilité :
La loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites prévoit la création d’un Compte prévention pénibilité dont la mise en œuvre est progressive : 4 facteurs de risques sont pris en compte en 2015, et 6 autres en 2016.
Les 10 facteurs de risques sont les suivants :
- Contraintes physiques marquées
- la manutention manuelle de charges ;
- les postures pénibles ou positions forcées des articulations ;
- les vibrations mécaniques ;
- Environnement physique agressif
- les activités exercées en milieu hyperbare (hautes pressions) ;
- les agents chimiques dangereux, y compris poussières et fumées ;
- les températures extrêmes ;
- le bruit ;
- Rythme de travail
- le travail de nuit ;
- le travail en équipes successives alternantes ;
- le travail répétitif.
Le décret a défini des seuils annuels minimum d’exposition, associés à chacun des 10 facteurs de risques cités.
Depuis 2015, les employeurs sont dans l’obligation d’évaluer l’exposition des salariés aux facteurs de risques en vigueur.
Comment évaluer les facteurs de pénibilité ? Les étapes-clés de la démarche de prévention
Réaliser un état des lieux
Avant toute chose, il est nécessaire de réaliser un état des lieux pour repérer où se situe la pénibilité (quelles situations de travail ? quels postes ? quels facteurs ?…) et quels sont les phénomènes d’usure professionnelle dans l’entreprise.
Ce diagnostic est nécessaire à toute démarche de prévention des risques professionnels et de la pénibilité, et il est un préalable incontournable dans le cadre des différentes obligations légales (négociation d’un accord….). Autant s’en emparer au mieux !
Que faut-il analyser ?
- le nombre et la nature des accidents du travail, maladies professionnelles, restrictions d’aptitude, inaptitudes
- les causes de l’absentéisme et du turn-over
- la typologie des salariés les plus fréquemment touchés par des problèmes de santé (jeunes ? seniors ? anciens ? nouveaux embauchés ? un métier spécifique ?)
- le type de douleurs et de plaintes exprimées par les salariés
- les services, postes de travail ou métiers où l’on rencontre le plus de problèmes de santé (ceux où les salariés touchés travaillent actuellement ou ceux sur lesquels ils ont travaillé au cours des années précédentes).
En analysant ces informations, on obtient une liste des postes de travail apparaissant comme les plus pénibles, ainsi qu’une liste des problèmes de santé les plus fréquents sur ces postes.
Repérer les sources de pénibilité
Après avoir listé les postes pénibles et les problèmes de santé récurrents, on cherche ensuite à repérer les sources de pénibilité sur ces postes.
Comment faire ?
La loi définit les facteurs de pénibilité et des seuils d’exposition rentrant dans le cadre des obligations légales, il est important de les garder à l’esprit durant cette phase d’identification.
Néanmoins, la santé au travail ne s’arrête pas à cette seule mise en conformité avec la loi. Il paraît intéressant de dépasser la question légale pour s’intéresser à la prévention des risques professionnels de manière plus globale et au plus proche des réalités de votre entreprise.
Dans cadre, on identifie 4 grands types de contraintes de travail pouvant avoir des effets sur la santé de salariés.
- Les contraintes physiques : manutention de charges lourdes, manutention répétée de petites charges, postures contraignantes, gestes répétitifs, mouvements empêchés
- Les contraintes liées à l’organisation du travail : travaux sous cadences, rythme de travail soutenu, délais de production serrés, interruptions fréquentes, horaires atypiques, travail posté, absence de possibilité de s’entraider entre collègues, autonomie limitée, pas de possibilité d’adapter son travail à son propre confort
- Les contraintes liées à l’environnement de travail : travail dans le bruit, au froid ou à la chaleur, manipulations de produits toxiques, exposition aux vibrations, de nombreux déplacements à effectuer pour récupérer les produits ou les informations, espace insuffisant entre deux postes, circulation difficile des produits et des matières premières.
- Les contraintes psychiques : concentration soutenue et prolongée, traitement d’un grand nombre d’informations, pression temporelle, urgences constantes, ordres et consignes contradictoires, changements permanents d’organisation, manque de reconnaissance, perte de sens au travail, climat social tendu.
Associer les salariés
Pour identifier les contraintes auxquelles sont exposés les salariés, il est essentiel d’interroger ces derniers sur leur vécu et leurs réalités quotidiennes, et de prendre le temps de les observer en plein travail. C’est le meilleur moyen de se rendre compte des réelles contraintes.
De la même manière, les actions visant à réduire les contraintes de travail seront d’autant plus bénéfiques et efficaces qu’elles seront définies en concertation avec les salariés.
Adapter l’organisation du travail
Agir sur l’organisation du travail est la première chose à faire lorsqu’on veut réduire la pénibilité. Des modifications dans le fonctionnement de l’entreprise peuvent souvent se révéler bien plus efficaces que des investissements matériels coûteux.
Pourquoi ? Tout simplement parce que dans tous les métiers, les salariés ont des tâches variables à effectuer et font face à des imprévus.
Or, s’ils sont soumis à de nombreuses contraintes, les salariés risquent de forcer sur leur corps ou de « prendre sur eux » pour assumer ces aléas : cela génère de la pénibilité.
La réduction de la pénibilité passe ainsi par deux actions essentielles :
- Donner aux salariés les moyens de s’organiser
Pouvoir anticiper leur charge de travail, pouvoir changer l’ordre des tâches ou varier la vitesse d’exécution, éviter le flux tendu, favoriser l’entraide entre les salariés (prévoir un fonctionnement, un planning et des locaux qui le permettent), développer l’autonomie, garantir le soutien et la disponibilité de la hiérarchie en cas de problème… - Réduire les contraintes liées à l’organisation du travail
Limiter les rythmes de travail imposés ou sous cadence, donner la possibilité aux salariés de faire varier le rythme de travail, limiter le travail de nuit et en horaire atypique, aménager des temps de récupération suffisants, des pauses dans le travail…
Favoriser l’évolution professionnelle et la transmission des compétences
Favoriser les parcours professionnels et la polyvalence des salariés est une autre manière de les « soustraire » aux situations de pénibilité. En changeant définitivement de poste de travail, ou en alternant différentes tâches, les salariés cessent d’être exposés en permanence aux mêmes contraintes de travail.
Comment faire ?
- repérer les compétences développées par les salariés dans leur poste actuel et identifier celles qui sont transférables à d’autres postes ou d’autres fonctions dans l’entreprise
- favoriser l’acquisition de nouvelles compétences par la formation ou le tutorat
- favoriser la mobilité professionnelle au sein de l’entreprise et/ou organiser la polyvalence.
Par ailleurs, les salariés développent au fil du temps des savoir-faire leur permettant de se préserver au travail et de protéger leur santé : ils acquièrent des techniques et des « tours de main » pour anticiper les efforts, éviter le port de charges lourdes, faire autrement… Ces stratégies individuelles, ou collectives, permettent de réaliser efficacement le travail, tout en subissant moins de pénibilité. Il s’agit donc de favoriser leur transmission vers les nouveaux arrivants.
Agir sur les dispositifs techniques et l’environnement de travail
Parfois, il est aussi nécessaire d’agir directement sur le matériel ou sur l’adaptation des postes de travail, pour réduire les contraintes physiques du travail.
Cela passe par des actions simples et pratiques :
- revoir la conception des postes de travail (hauteur, largeur, espace de travail…) pour éviter les postures contraignantes
- réduire le poids des matériaux ou des produits à déplacer pour éviter le port de charges lourdes
- fournir des outils et engins de manutention adaptés à l’activité
- prévoir un espace de travail suffisant au regard du nombre de salariés y travaillant
- implanter les postes de travail de façon à favoriser les échanges et les consignes…